16 octobre 2005
Gauche caviar
Tiré du site Pluriel (socialiste, je crois. Mais on s'en foiut: seule compte la pertinence du discours et la lutte contre les idées reçues, le confort mental, le carpofolisme)...
Voici une pensée un peu plus saine, contre les carpofolo de tout poil, les lanceurs de mots, plein de sous-entendus...
La Gauche caviar, mythe ou réalité ?
Il y avait eu la gauche intellectuelle, la gauche critique, la gauche modérée, la gauche radicale… Depuis les années 80, il y a la gauche caviar. Ce n'est plus désormais un positionnement politique qui colore l'appartenance à la gauche, c'est un marqueur socio-culturel et économique. La Gauche caviar serait ces gens riches, anonymes ou connus qui auraient leurs entrées dans les cercles du pouvoir qu'il soit économique, médiatique, culturel ou politique, sans nécessairement en être et qui auraient un niveau ou un train de vie aisé. Cette définition bien sûr ne satisfait pas car, elle ne comporte pas la part morale qui convient. La gauche caviar est forcément bourgeoise au sens gauchisant du terme, elle ne connaît la misère que d'en haut et donc, pour elle, être de gauche, c'est se révolter confortablement.
En fait, on reproche à ceux que l'on affuble de ce sobriquet de ne pas ressembler assez à ceux qu'ils prétendent défendre et de manquer de sincérité et d'authenticité dans leurs engagements.
Avoir ou pas la tête de ses idées…
Si on regarde les images qui illustreraient une histoire de la gauche, on verrait qu'encore une fois, 1968 constitue une césure culturelle importante. Avant, on n'avait pas "la tête de ses idées" forcément. Marx, Jaurès, Lénine, par exemple n'avaient rien à envier à l'élégance des grands dandys de leur temps. Le camarade Krivine appelle à la révolution en costard cravate. Les socialistes vouvoient François Mitterrand (mais là, on conviendra que c'est un cas particulier…). La révolution culturelle qui s'empare du monde occidental à la fin des années 60 ouvre une ère paradoxale conformiste au temps du non-conformisme dominant. Désormais, en politique, il est de bon ton d'avoir la tête de ses idées. Dis moi comment (et chez qui ) tu t'habilles et je te dirai qui tu es. On avait du mal parfois à faire la différence entre un gaucho et un facho car les derniers portaient pattes d'eph et cheveux longs parfois, désormais, on reconnaît le gaucho.
Jusqu'aux leaders des grandes centrales syndicales qui ne sont pas à l'avant garde de la nouveauté en termes de mœurs, qui n'arborent plus la cravate d'un Séguy, d'un Maire ou d'un Bergeron… Voyez l'allure d'un Bernard Thibaud par exemple !
Des détails que tout cela ? Pas tant que ça. Car, aujourd'hui, les codes vestimentaires sont largement dominés par des références politiques chez nombre de militants. Et en politique, les plus avisés n'ignorent pas le caractère fondamental de la représentation.
Peut-on être de gauche et riche ou aisé ?
Mais, les prolos ne sont pas détenteurs exclusifs du label "certifié de gauche". Contrairement à la droite, la gauche est constamment soumise au jugement moral qui prend des aspects de contrôle de qualité auquel tout le monde se livre depuis de nombreuses années. Il y a un ordre moral venu d'en bas, nourri par les nihilistes de tout poil, issus de la gauche radicale et libertaire, des apolitiques consuméristes et abstentionnistes, (mais souvent antifascistes), relayé par la presse et qui relance l'ambiance dans les dîners en ville et les soirées entre potes, qui se plaît volontiers à instruire en permanence le procès de la gauche qui n'a ni droit à l'erreur, ni droit au temps.
Il y a une réalité qui est la difficulté du rapport de la Gauche à l'argent. Tout le mouvement social et révolutionnaire s'est construit à la fois contre les puissances de l'argent et contre la notion de propriété privée. Aussi, même le plus radical des riches semble moins légitime que le plus sceptique des ouvriers.
Le phénomène n'est pas que Français bien sûr. En Argentine, on emploi l'expression de "gauche sushi" pour désigner ce que les Anglo-saxons appellent avec (ils le reconnaissent eux-mêmes), moins d'humour que les Français, le radicalisme chic ou le "limousine liberalism".
Dès lors que la Gauche en pénétrant dans la société, ses idées faisant leur chemin dans les mentalités a pu être crédible pour la conquête puis l'exercice du pouvoir, elle a produit tout naturellement ses propres élites et sa propre noblesse. Cette minorité a occulté le reste. Le gang des Renault 25 et la coupe de champagne de Jack Lang sont les icônes les plus fortes de ce qu'on appelle "la gauche caviar". Il est évident que quand une certaine gauche se vautre dans l'argent et l'aisance et qu'elle en arrive a préférer la défense de son mode de vie à la défense des causes qui sont sa raison d'être à l'origine, il y a un problème…
Mais, ne s'assumant pas comme telle, la gauche caviar est un objet non identifié, car elle n'existe quand dans la bouche de ses détracteurs. Pour autant, il reste deux enseignements : quand on se contente d'indignations consensuelles, il n'y a aucune dynamique pour tenir tête aux forces de la réaction. Le second est que lorsque les différences avec la droite sont invisibles, c'est que notre combat ne va pas dans la bonne direction.
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