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orlando de rudder
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5 février 2007

Le couteau de Maman…

Elle s’attend à revoir le matin qui s’en va.  Elle pose une tranche de pain sur la table.  Le manche noir du couteau lui fait plus peur que la lame. Les larmes ? Ce n’est que de l’eau. Dire qu’on n’a pas le temps de vivre !

Pourtant, ça devrait se faire puisqu’elle reste là. Deux coudes sur la table. Elle n’a pas pour elle-même les mots d’une mère .  Mais ce qu’on dit aux chiens quand on joue à être bête. Et quand on sera morts, on sera comme Maman. Ni plus ni moins. C’est parti mais c’est là. On y pense quand même. Sans y penser parfois.

Ce couteau se souvient d’avoir beurré des tranches quand jadis on coupait nous-même le gros pain.  Maintenant ça se fait à la boulangerie. Tout se passe donc ailleurs ? Pourquoi est-elle  ici ?
On vit comme en passant. Mais ce qui passe reste. Comme une ombre collante détachée de nos pieds, une ombre de goudron sur un trottoir grisâtre assoiffé de chaleur. Une ombre pas à pas. Quel âge aurait Maman ?...  Si elle n’était pas morte ? A quel âge arrête t-on de se penser vieillir ?

Ce couteau, tout de même : on ne se souvient plus…  Quand fut-il acheté ? On l’a  toujours vu là.  On l’avait toujours vu dans la main de Maman.  Et puis maintenant, dans sa main à elle.  Toujours ?

Le matin est parti.  C’est du pareil au même. Encore du café chaud. Comme Maman l’aimait, avec un petit sucre. Comme elle l’aime aussi. C’est bien mieux que de l’eau. C’est bien mieux que des larmes. Mais ça brûle tout autant. Mais ce n’est pas salé.  Le matin est parti. Maman aussi.  Voilà.

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