Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
orlando de rudder
orlando de rudder
Publicité
Archives
27 avril 2008

Pied de table.

Je n’aime plus ce que j’aimais : Un pied de cette table clochepatte en décalage. Je me suis assis là, accoudé en instable, profitant du tangage pour balancer son âme comme sur un tape-cul. Ce tangage de la table me vibre au coude à coude : nous sommes du même bois, genre coudrier qui bouge. Il y a toujours eu du guingois, dans ma vie, dans les bringues assidues d’autrefois et même dans cette table qui bringueballe aussi. Je n’aime plus ce que j’aimais : Il y a des heures pour tout déclare l’Ecriture. Et devant chaque personne se déroule un chemin. Il y a des souvenirs qui imprègent le sang.On peut crier tout seul, ça vous tanne quand même. Parfois, devnt la glace, en me rasant, matin, je déchiffre amusé ma biographie de peau : rides d’amours connues, hiéroglyphes cacochymes de mon corps sarcophage, de mon cœur bathyscaphe en plongée abyssale. . Jadis j’ai pratiqué la riboudingue alerte et de l’alcool en vrac ponctuait nos manières. Aujourd’hui, malepeste, je n’aime plus ce que j’aimais. Je ne sais pas pourquoi. Chaque chose a sa raison ; il faut garder les vaches et le fil barbelé n’est pas fait pour les chiens. Je n’aime plus ce que j’aimais, pas plus que celle qui fut là et que j’aimais aussi. C’était une belle femme du genre qui plaît ainsi. Etait-ce avant jadis ou la veille de naguère ? Il y a un temps pour tout, même pour regarder l’heure ! Mon cœur dégingandé se déglingue en rafales surveillant la vieillesse qui se pointe au cadran. Je n’aime plus ce que j’aimais : Le temps se soûle tout seul de sa propre substance et par degrés constants. Quelle force a-t-il donc pour s’en intensifier de seconde en minute avec bon pied bon oeil? L’écriture n’y peut rien et je m’y habitue. Je n’aime plus ce que j’aimais : Le vin roule dans les verres, la houle devient tangible. Mon cœur a voltigé comme une escarpolette et l’amour vieillissant a contrefait la guerre entre celle qui était là, beau parti s’il en fut, et moi sur le départ, car j’ai pris la tangente, je ne sais pas pourquoi ; ça m’a tanné le cœur, ça a strié ma peau. Je n’aime plus ce que j’aimais : Je vais mettre une cale sous le pied raccourci de la table mouvante. Quand je plie du papier pour que la table soit stable, je me sens accablé par d’autres souvenirs. Ca me rappelle des lettres, des billets doux exquis et l’amour écrasé comme par un pied de bois pareil à une gueule faite du même métal. Je n’aime plus ce que j’aimais. Il y a trop de clôtures et de fer barbelé. Les chiens pissent dessus, on ne garde plus les vaches et celle qui fut là ne dit plus rien qui vaille à mon cœur désolé devenu dur à cuire comme une vieille chaussure faite de peau de veau, de cochon ou d’émeu ou encore d’élan. JE n’aime plus ce que j’aimais : Des douleurs de mémoire me pincent durement. Ca s’élance, lancinant et je lampe du vin blanc. Mon chemin devant moi n’a plus de carrefour. Il n’y a plus de lumière, la lune est au déclin .Je vais reprendre un verre et ne plus m’émouvoir. Un jour si Dieu le veut, je changerai mon outre, je boirai lentement, j’achèterai du vin vieux, comme dans l’Ecriture, et une table en bon bois qui ne boîte jamais.
Publicité
Publicité
Commentaires
A
Quand la matière tangue cela va un peu tant que l'esprit s'en distrait et ne se met pas tanguer lui-même. Desproges, c'est aussi l'art de faire tanguer l'esprit, "ça" amuse au début mais l'esprit s'en trouve rapidement mal à l'aise!<br /> Je ne développe pas ce qui a été finement analyser par Sieur Orlando. Il faut se méfier des sophistes des Temps modernes. <br /> A Elle sur la lune, j'ai connu Pierre Péju au journal, il avait l'art de la formule et mettait de la bonne humeur quand il passait!
E
" De creux en crêtes, de vallons en sommets, de rapides en méandres, nous sommes toujours au milieu des temps, et les temps ne manqueront pas de changer encore. " Pierre Péju .
Publicité