L’illusion du bonheur est un enfer tranquille !
Les gens heureux sont graves.
Jules Barbey d’Aurevilly, « Le bonheur dans le crime », Les Diaboliques.
Volubilis ? Fleur à la con ! Oui, j’en ai marre de ce jardin ! Roses à gifler ! Mais les épines…
Jardin mielleux : là, tout va bien… Les fleurs superbes incitent à des gnagnasseries planplan-cucul ! Ca manque d’orties, de drosera, de bryone, de ronces mafflues !
Je ne veux du désir qu’un féroce urticaire ! Une éruption torride de volcan furonculeux ! Une frénésie dentue à faire pourrir les fleurs !
Bordel de merde, quand c’est qu’on s’aime avec les dents ? En fleurs de viande, en ouragan ?
Ici le bonheur nous sourit niaisement ! D’un sourire adipeux de crétin satisfait ! On en deviendrait zen comme un pot de yaourt ! Vide et biodégradable ! Pollue-moi donc le cœur comme une marée noire ! Moi, je veux de l’amour qu’il soit irréparable !
Harmonie florale, sale gueule de myosotis géraniums obèses et datura visqueux ! Il faut que cela cesse, illico ou presto ! Jardin nul trop paisible ! C’est du chichi pas frais ! Du recuit-magazine maisonneux jardinesque !
Moi je veux, en taudis, dans un grand terrain vague, de l’amour vif qui rouille, qui coupe et qui fait mal ! Epices et friture, qu’on se brûle pour de vrai ! Que ça flamboie, que ça grésille !
T’appelles ça de l’amour ? Sans incendie tenace, fumée épaisse qui nous étoufferait, vingt dieux ? Merde au volubilis, Piétinons l’hortensia en poussant des cris rauques de barbares avinés ! Devenons vrais, divins, quittons ce paradis ! L’illusion du bonheur est un enfer tranquille !