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orlando de rudder
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26 août 2006

Voici un extrait de mon livre, "Aux PEtits oignons" qui paraît en Septembre

Bœuf : Travailler comme un bœuf, mettre la charrue avant les bœufs, on nest pas des bœufs, qui vole un œuf… Le Bœuf gras, confiture de bœuf, etc. Le latin bos, bovis désignait le mâle de la vache. On trouve le sens de « taureau castré » au XIIe.s.Dans le Roman de Renart, le sens de « viande » est attesté. Henri Estienne, au XVIe.s. mentionne l’expression « mettre la charrue avant les bœufs ». Molière, dans L’Ecole des maris (1661, appelle « bœuf » une « personne stupide » ou abrutie. Le bœuf a toujours été aimé : cet animal courageux symbolise la placidité, la force paisible, la puissance, le travail acharné et le sacrifice. Mais aussi la lenteur d’esprit, la lourdeur intellectuelle. Il est présent dans un grand nombre d’expressions françaises : « Travailler comme un bœuf » , « mettre la charrue avant les bœufs », etc. Sans oublier La grenouille qui veut se faire aussi grosse que le bœuf, du bon La Fontaine,( Fables, I, 3) , l’un de ses chef-d’œuvres ! Faire un effet bœuf , c’est épater la galerie , se montrer surprenant. On dit aussi avoir un succès bœuf : C’est quand les veaux ont un succès bœuf que les bœufs font une tête de veau.Pierre Dac, Essais, Maximes et Conférences, 1978. La procession du bœuf gras constituait le « clou » du carnaval parisien au XVIIe.s. Il s’agissait d’une ancienne coutume que l’on veut druidique mais qui semble plutôt gréco-romaine, car il n’existait guère de symbolisme indépendant du bœuf, en dehors, plus tard, de la symbolique chrétienne. La procession du bœuf gras est attestée dès le XVe.s. Les associations de bouchers et de garçons bouchers (on ne disait absolument pas les corporations ) s’attachant à réussi ce rite. Le bœuf était mené, paré, peigné, lissé, dans les rues, accompagné de chansons et de danses. La Révolution supprima cette fête. Puis, Napoléon la rétablit, et elle dura jusqu’à la guerre de1870. C’était un événement qui défrayait la chronique de l’époque. Voici ce qu’en disait, dans Le Carnaval, Sébastien Gastineau en 1855 : La Promenade du Boeuf Gras, qui a lieu le dimanche, le lundi et le mardi gras, excite au plus haut point la curiosité publique, et attire à Paris les habitants des communes voisines. Une troupe de marchands d'écrits imprimés crient à tue-tête : L'ordre et la marche du boeuf gras, un sou !... Les rues, les boulevards sont encombrés de curieux qui attendent avec anxiété, qui interrogent pour savoir si la victime doit bientôt passer. Aucune expression ne saurait donner une idée de la passion de ce spectacle. Hommes, femmes, enfants se bousculent, se précipitent brutalement, étourdiment, au risque d'étouffer et de se briser les os. Lorsque le boeuf paraît, des acclamations immenses l'accueillent : Les ah oh ! oh ! ah ! le voilà le voilà ! Toutes les formules d'admiration enthousiastes retentissent à la fois. L'animal, ruminant sa fin et regrettant ses grasses prairies de la Normandie, passe triste et majestueux; il marche à la mort en triomphateur. Par intervalles il relève lentement la tête, et regarde d'un oeil plein de dégoût et de mépris la foule en délire qui l'acclame. La tête du cortège est formée de chevaliers de fantaisie, romains, moyen âge, renaissance, et d'une troupe bruyante de musiciens également travestis. Deux sacrificateurs et des sauvages armés de massue marchent côte à côte du boeuf corné d'or et d'aigrettes, orné de bandelettes. Puis, traîné par quatre chevaux somptueusement harnachés, s'avance un char très élevé sur lequel trône bouchers et bouchères figurant le Temps, Jupiter, Junon, Mars, Hercule, la Folie. Au milieu des dieux et des demi-dieux, apparaît l'Amour, petit enfant blond et frisé, retenu sur son trône par Vénus, sa mère, et les trois Grâces, les plus belles femmes qu'on ait pu trouver parmi les bouchères de Paris. Après sa dernière promenade, le bœuf gras est assommé, puis servi sur les tables des dignitaires. Cette cérémonie, renouvelée des Égyptiens, des fêtes de Bacchus et de la marche triomphale du dieu-boeuf Apis ne manque ni de somptuosité, ni d'éclat, quoi qu'il y ait quelques singularités à voir un préposé à la surveillance des marchés ou un boucher représenter le maître de l'Olympe, dont Homère a dit qu'on froncement de ses sourcils ébranlait le ciel et la terre. Si la procession a laissé sa trace dans le folklore parisien, il n’en est pas moins vrai que ce type d’événement a eu lieu en divers endroits : avec des variations et des spécificités locales, la procession du bœuf gras est une fête d’origine païenne extrêmement vivace. La procession renaît un peu partout, comme à Paris. « On dirait du bœuf « est à l’origine de l’expression on dirait du veau et s’appliquait tout d’abord à un homard (voir Veau). La gourmande Colette n’est pas de reste lorsqu’il faut célébrer les merveilles culinaires. Elle appréciait particulièrement la simplicité dans la préparation et loue, dans Récriminations, l’excellence de Madame Yvon, cordon-bleu de grande race : Un jour que j'avais mangé, chez elle, un bœuf à l'ancienne qui comblait au moins trois sens sur cinq, - car outre sa saveur sombre et veloutée, sa consistance mi-fondante, il brillait d'une sauce caramelline, mordorée, cernée sur ses bords d'une graisse légère, couleur d'or, - je m'écriai : - Madame Yvon, c'est un chef-d’œuvre Comme on voit bien que vous n'avez pas la foi, Colette...! Avec quoi faites-vous ça ? - Avec du boeuf, répondit Mme Yvon. - Mon Dieu, je le pense bien.. Mais tout de même, il y a dans cet accommodement un mystère, une magie... On doit pouvoir, à une merveille comme celle-là, donner un nom ?... - Bien sûr, répondit Mme Yvon. C'est du boeuf. Il ne faudrait, pour maintenir, pour sauver et justifier l'orgueil gastronomique de France, que quelques Mme Yvon. L'espèce en est rare, en ce temps qui fabrique de la soie sans soie, de l'or sans or, de la perle sans huître, et Vénus sans chair... « Qui vole un œuf vole un bœuf « signifie : qui peut le moins peut le plus, dans l’ordre de la délinquance : On commence par voler un œuf. Ensuite on vole un bœuf. Et puis on assassine sa mère. Jules Renard, Poil de Carotte, 1894, Et Chaval ajouta : Qui vole un bœuf est vachement musclé ! Un bœuf , dans l’argot du jazz, est la réunion de divers musiciens. Elle est parfois impromptue, improvisée et se passe souvent after hours après les heures de travail… En anglais, il s’agit d’une confiture, c’est le sens de jam dans l’expression jam session désignant un … bœuf ! La confiture de bœuf est faite de bas-morceaux longuement cuisinés avec beaucoup d’épices et d’aromates. On obtient une pâte brune, d’une consistance tartinable, que l’on empote dans des bocaux à confiture pour la conserver. Il faut la cuire sans aucun ajout de graisse (au contraire : on ôte celle qui surnage, c’est toujours ça de moins !) ni de sel : ce qu’en contient le bœuf suffit. C’est un régal dont on enduit de grandes tartines de pain bis que l’on peut avoir auparavant grillées. Certains surnomment ce délice Nutella pour adultes . Voir : Thé. Bombance, bombe: faire bombance, faire la bombe.« Faire la bombe » ? Il ne s’agit guère de menée terroriste ! Mais bel et bien d’une ripaille ! Comme, beaucoup plus tôt, Brillat-Savarin, Maxime du Camp s’est senti abasourdi par l’ivrognerie batave, flamande, autant que marine, anticipant, dans sa description le climat alcoolisé d ‘Amsterdam, chanson de Jacques Brel : Il se fait alors de formidables bombances; le genièvre abreuve et suscite bien des folies; parfois on y joue du couteau, et souvent le marin, entré riche, sort ruiné, dépouillé et presque nu, car il a laissé ses vêtements en gage.Maxime Du Camp, En Hollande, 1859, Il existe un grand nombre de termes d’origine onomatopéique issu du radical expressif bob- le quel exprime l’idée d’enfler, de grossir, de gonfler. On a donc eu faire bombance , avec, sans doute l’influence de bombarde , puisque, tel le canon, il s’agissait aussi de faire du boucan. Le gonflement peut évoquer le jabot d’un faisan, l’orgueil outré : boban a signifié orgueil ou vanité , voire arrogance au début du XIIe.s. Il est vrai qu’on peut se monter présomptueux lorsqu’on se livre à de franches lippées et autres beuveries menant parfois à l’insolence et à l’outrecuidance provocatrices. « Bombe » semble être une abréviation de bombance. Chez le gouleyant Ronsard, on a boubance (Hymne de l’Or). Il s’agit ici d’un festin. Mais l’excès peut prendre d’autres formes : Grandir, ce serait passer de la boulimie à la gourmandise, de la bombance à la dégustation.Marie-Louise Audiberti, « Une enfance boulimique » in Nourritures d’enfance , Autrement, avril 1992. Bonbon : coûter bonbon. Une jupe à « ras le «bonbon ». Ce mot n’apparaît, semble t-il, dans la langue écrite qu’en 1609. Mais c’est dans le Journal de Jean Héroard sur l’enfance et la jeunesse de Louis XIII ! Le précepteur du roi, de celui qui devra reconquérir son trône, a noté tous les faits et geste de sa pupille royale. Les bonbons, comme toutes les friandises sont mal vus et constituaient naguère des récompenses. Sauf dans certains cas : … il est de mode, par exemple, de faire déjeuner son mioche avec un rogaton douteux, une bribe insuffisante, mais de lui donner deux sous pour acheter des bonbons. Une tartine de saindoux et deux sous de pastilles de menthe.Léon Frapié, La Maternelle, 1904. « Coûter bonbon » signifie couter cher. Sans doute, le désir enfantin des bonbons en ont fait une chose précieuse. Cependant, tous les enfants n’aiment pas les bonbons : Un bonbon ? Que ferais-je d’un bonbon ? Je ne suis pas un bébé. D’accord, ça brille de mille feux et ça fait chic. De telles qualités ne m’intéressent guère, je ne suis pas une croqueuse de perles. Enfin, si vous y tenez, ça m’occupera toujours un moment.Marie-Louise Audiberti, "Une enfance boulimique" in Nourritures d’enfance , Autrement, avril 1992. Le tendre Louis Pergaud a crée le néologisme bonbonnet (De Goupil à Margot, 1910). Une jupe à ras le bonbon est tout ce qu’il y a de plus mini. Car bonbon désigne, en argot, le sexe féminin. Ce qu’a illustré Léo Ferré : La the nana C'est dans la voix et dans le geste La the nana C'est the nana avec un zeste La the nana Quant à la jupe à ras l'bonbon La the nana C'est pas qu'c'est gagné ... mais c'est bon ... Cependant, en avoir « ras le bonbon » , c’est en avoir assez, en avoir marre , être lassé.Terminons par un curieux galimatias, d’un auteur souvent mieux inspiré : Les bonbons font passer une espèce de pilule dont, faute de l’avoir encore perçue du bout de la langue ou croquée, nous sommes légèrement anxieux. Ils sont comme les sonates, les théories, les religions, l’amour, la peur même peut-être- qui sont autant d’enveloppes de sucre plus ou moins sirupeuses ou sucrées qui vêtent des nudités elles-mêmes plus pu moins en hardes ou frustes. Pascal Quignard, Le Salon de Wurtenberg.
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Commentaires
A
Marie-Louise Audiberti est un vrai bonbon... selon sa description et the nana est une des chansons de Léo souvent eclipsée par d'autres bons mots extras, et Pasqual Quignard devrait servir à une pétition contre les bonbons légaux illicites, c'est vrai que l'on a du mal à digérer la très paradoxale théorie doppée aux bonbons caméléons... si vous en êtes d'accord, je reprendrais ce passage sur mon blog, beaucoup moins fréquenté mais c'est pure gourmandise...<br /> Amitiés,<br /> Amel acquise aux petits oignons!
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