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orlando de rudder
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17 juillet 2006

Mordillat voyageur!

Ca fait bien longtemps que je n'ai pas vu Gérard Mordillat. Je l'ai connu, il y a plus de vingt ans! On a travaillé ensemble sur un scénario, avec Etienne Roda-Gil et Jean-Claude Petit. C'était un film qui, déjà, parlait des banlieues! Tendrement! Et le rélisateur, elparolier, le musicien, le scénariste mettaient tous la main à la pâte pour bâtir une belle histoire! On a bossé dur et, comme souvent, au cinéma, le projet est tombé à l'eau! Oui, ça fait bien longtemps que je n'ai pas vu Gérard MordillatOn s'écrit, bien sûr, mais on vit assez loin l'un de l'autre. Ce gars du XXe. Vit dans monXIIe. MAis faut être parigot pur comprendre la chose, et cette parenté et cette différence entre certains quartier: Bastille, Ménilmontand, le coin de Casque d'Or, les Orteaux, Popincourt, et autre mondes à part. Car il s'agit bien de lieux et de voyages. On n'aime pas trop voyager. Comme pour beaucoup de bourlingueurs, ça c'est fait malgré nous. Nous représentons le contraire de ce brave savant Cosinus: lui voulait partir et n'y parvenait pas. Nous, on veut rester là et voici qu'on s'en va! " Le voyage n'est nécessaire qu'aux imagination courtes" disait Colette. Ca se voit tous les jours avec le tourisme, les vacances. MErveilleuses vacances qui permttent aux riches d'aller voir les pauvres et aux retraités de contempler des gens qui mourront avant eux... Bon, voilà ce qu'ikl dit, Gérard, dans Le Monde: Gulliver, mon ancêtre, mon double, par Gérard Mordillat LE MONDE DES LIVRES | 13.07.06 | 10h41 • Je n'aime pas voyager. Non : je n'aime pas partir, c'est différent. C'est le départ qui m'angoisse. Partir, mais pour aller où ? Pour aller voir ailleurs si j'y suis ? Pour se dire que ce doit être mieux là-bas qu'ici ? Quel ennui ! Autant rester où je perche puisqu'il me suffit d'écrire sur une page blanche : Rome, Florence, Venise, les îles de la Sonde, les Maldives, Copacabana, New York, Saint-Pétersbourg, Hawaï... pour y être. Bref, j'aime mieux le Voyage autour de ma chambre que Le Tour du monde en quatre-vingts jours. Pourtant, poussé par la nécessité de gagner ma vie et celle de ma famille, à l'instar de Gulliver mon ancêtre, mon double, il m'arrive de céder et de me lancer à la découverte des contrées lointaines, à bord de L'Aventure... Gérard Mordillat Gérard Mordillat est romancier et cinéaste. Avec son premier roman, Vive la Sociale ! (1981, "Points"), l'auteur donne à voir un quartier populaire de Paris dans les années 1960. Simultanément, Gérard Mordillat collabore à des séries télévisées. Il est coauteur, avec Jérôme Prieur, des séries Corpus Christi et L'Origine du christianisme. Son dernier roman, Les Vivants et les morts (Calmann-Lévy, Le Livre de poche), a reçu le prix RTL-Lire en 2005. [-] fermer A la suite d'une violente tempête et d'un naufrage - mais qui ne connaît pas un naufrage, ne connaît rien à la vie - me voilà sur la plage de Lilliput, le pays où les hommes et les femmes sont petits. Disons d'emblée que je n'aime pas l'adjectif "petit", surtout dans la locution "le petit peuple", celui censé représenter la fameuse "France d'en bas", au regard hautain des grands bourgeois. Si les hasards de la génétique m'ont fait d'une taille raisonnable, je me sens comme chez moi à Lilliput et, un mètre quatre-vingts ou pas, je parle à hauteur d'hommes, aussi bien avec les ouvriers de la rue des Rigoles, qu'avec les enfants de la douce et dure banlieue ou, plus à l'est, les chômeurs sacrifiés au nom du dieu Profit sur l'autel de la rentabilité à court terme. Mes amis sont les déserteurs de la guerre d'Algérie, les communards morts au cri de "Vive la Sociale !", les sans-culottes de 89 et tous les sans de notre quotidien : les sans-argent, les sans-papiers, les sans-nationalité, les sans-logement, les sans-espoir, même les sans-sans, ceux à qui le langage n'est pas donné et qui comptent sur moi pour faire entendre leur voix. Lilliputien d'honneur, mes quartiers de noblesse seront toujours Belleville, Ménilmontant et Charonne pour faire bonne mesure, comme on dit à Lilliput ! SE RISQUER CHEZ LES GRANDS Le voyage chez les petits étant un voyage sans fin, pour me distraire je décidai de me risquer chez les grands, à Brobdingnag, afin de les cinématographier. Mais, c'est un trait de mon caractère, aussi bien qu'il m'est impossible de me sentir grand chez les petits, il m'est impossible de me sentir petit chez les grands. Les "grands", entendons-nous : ceux qui exercent un pouvoir. Un pouvoir économique, comme les patrons d'industrie, un pouvoir spirituel, comme les exégètes et les théologiens, un pouvoir militaire, comme les historiens et les stratèges, un pouvoir politique, comme les élus de la représentation nationale. Est-ce à cause de la puissance de leur voix, mais curieusement ce qu'ils disent est aussi peu, et aussi mal, entendu que ce que disent les petits de leurs petites voix. Aussi m'appliquai-je à les faire entendre, à décortiquer l'ordre de leur discours, à le fouiller, à l'explorer, à les observer faire leur cinéma, dans la nudité stupéfiante de leurs mots. Mon voyage à Laputa me fit rencontrer des êtres étranges, "la tête penchée, les uns à gauche, les autres à droite, et un oeil tourné en dedans et l'autre vers le ciel". Chez nous - à l'étranger, on aime bien parler de "chez nous" -, les laputiens ne forment pas un peuple, mais plutôt une corporation, un métier. D'ordinaire, on les appelle les "romanciers". Il y a des romanciers de droite et de gauche, chacun d'eux a un oeil tourné vers le ciel pour y trouver l'inspiration et un autre vers l'intérieur pour se scruter les tréfonds de son âme, comme on dit dans les livres sérieux. Faisant profession d'écrire et de filmer, je suis donc un peu laputien moi-même, bien que les lois de l'évolution poussent mon oeil tourné vers les autres à dévorer celui tourné vers moi. Et, si vous me croisez dans la rue, ne vous inquiétez pas si je ressemble à un houyhnhm, un de ces chevaux qui parlent et qui, plus que les humains, sont philosophes ; à force de les admirer j'ai fini par avoir, comme eux, les yeux en face des trous. Gérard Mordillat Article paru dans l'édition du 14.07.06 Lisez donc Mordillat! Il est bien pire que moi! En plus, c'est un ami... Alors, n'hésitons pas!
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