Les calamars
On faisait frire des calamars,
C’était une époque incertaine
Et sur la plage on n’osait pas
penser que l’horizon se noie.
La pluie féconde, faussement triste
Fabriquait des douceurs intenses
Et des plaisirs coquins, mignards.
Avec les filles, on se disait
Que le ciel serait à l’azur.
Le calamar est élastique
Et nous résiste sous la dent
Mais il devient presque fondant
Lorsqu’on le cuit bien plus longtemps.
Ainsi devint-on la bidoche du temps qui ronge,
Ô nonchalance de la durée !
Elle nous dévore rien qu’en passant,
Tout en badaudant sur nos cœurs
Comme on piétine les pavés.
On peut farcir les calamars
Avec des viandes épicées,
Nappés d’une sauce bien relevée
On s’en souvient au fil des ans.
L’amour bouillonne à casse-l’âme
Puisque souvent on ne veut plus :
il faudrait tout recommencer.
La solitude nous escagasse,
Elle nous fait même des pieds-de nez.
Les calamars, sauce au piment
Se mangent en se brûlant un peu.
Il faut du vin , des nudités,
Et des audaces à qui-mieux-mieux !
Les vies furent jeunes et n’ont rien vu.
Mais l’oubli commence à tarder :
Les myosotis ont repoussé
C’était ainsi, je n’y peux rien.