Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
orlando de rudder
orlando de rudder
Publicité
Archives
22 mai 2006

On rigole.

(Encore un extrait du "livre de discorde: notre lamentable héros, sommé d'assister à une fête de familel de son épouse pied-noir, est confrontée à des monstres de racisme, à des anciens tortionnaires et découvre un océan de bassesse veule. Si cela plaît, je ferai peut-être un feuilleton avec l'intégralité de cet ouvrage. Edifiant et montrant comment on peut tomber dans le piège de tout ce qui est moche, con, veule, pouacreux, moindre! Vive ;'Algérie libre. M^me si c'est pas demain la veille!) L’objectif des répressions, ce sont les répressions. L’objectif de la torture, c’est la torture. L’objectif du pouvoir, c’est le pouvoir. George Orwell, 1984, 1948. Hélas, il fallut arriver. Et se confronter à la bassesse des cent dix pieds noirs racistes participant à la fête. Certes, ces agapes sont souvent vulgaires… Mais celle-ci fut un festival de haine tenace autant que rigolarde. Il y eut évidemment des chansons, chacun la sienne, reprise en chœur, ce qui nous fit entendre C’est nous les Africains ou Tiens, voilà du boudin et d’autres joyeusetés souvent salaces. Puis les histoires drôles. Celle, trop connue du jugement du cadi : un homme… pardon : un Arabe, ayant volé des olives fut condamné à se voir introduire ces olives dans le cul. C’est déjà vachement marrant. L’ennui, c’est que le prévenu suivant, évidemment un autre Arabe qui pleurait à chaudes larmes, venait de voler des pastèques… ensuite, les histoires furent échangées à chaque table : -Tu connais celle de l’Arabe ? - Laquelle ? - Celle de l’Arabe qui pue. - Je la connais ! Elle est poilante ! - Et celle du melon qui… Bien entendu, je n’ai pas manqué d’entendre, dix, vingt, trente fois ce qui constitue aux yeux de tous ces déments hideux, la solution à tous les problèmes : - Les Arabes ? Faudrait tous les mettre sur une île déserte et lâcher une bombe atomique. La mère répétait, obsessionnellement : - On rigole ! mangeons, buvons, on est là pour ça, c’est la société de consommation ! On rigole… Son opinion sur les Arabes s’affirmait sans détour : - Ils nous regrettent, maintenant ! Et certains d’ajouter : - La preuve : ils viennent tous ici ! Quant au père, Jojo-le-minus, il continuait à pérorer, pontifiant. Ca donnait, par exemple : -Il n’y a pas de problème palestinien ! Leur pays, c’est la Jordanie, ils n’ont qu’à s’y installer ! Fortes paroles ! Quant à la mère, elle défendit, en petit comité, le Maréchal Pétain, « pauvre homme qui ne pouvait pas faire autrement » ! Rabat-joie, elle-même, se sentait confuse. Malgré la couleur locale, on se serait cru à un banquet de S.A. graveleux. Ca me rappela Les Damnés, de Visconti. Je n’eus vite même plus la force de protester, las d’entendre ces propos racistes, antisémites, sexistes, homophobes, anti-intellectualistes proférés d’un ton hilare. La totale, comme on dit. Je décidai de me soûler consciencieusement, dans mon coin… en-dehors ! Nazillons ! Coprostases ! Lithocardes ! Véroles ! Combien de tueurs, de bourreaux dans l’assistance ? Combien, parmi ces anciens militaires, ces anciens gendarmes et policiers pied-noirs ont-ils torturé, particulièrement en temps de paix, avant la guerre ? Je préfère l’ignorer ! Bien entendu, on vit apparaître les cotillons, langues de belle-mère, serpentins, confettis. Et chapeaux pointus. Et c’est ainsi qu’il ne put échapper à la plate bêtise générale. Jojo l’arabesque portait un chapeau pointu de carton orné de cercles jaunes et oranges. Et lui dut accepter le même chapeau avec des cubes ou des carrés de mêmes couleurs criardes. - Ah ! dit l’infâme, vous avez des cubes, moi j’ai des ronds. Et lui, le même osa répondre : - Vous avez des ronds ? C’est que vous êtes riche ! Cette plaisanterie lamentable eut une vogue inespérée ! Jojo s’esclaffa et alla la raconter partout. Tout le monde hurlait de rire à la grande confusion de l’auteur de cette insanité. Ca ne vaut vraiment pas la peine d’être écrivain, poète, d’essayer d’atteindre à la pureté, à la beauté, de s’acharner à proposer de l’amour en vrais mots ! De saisir le sens dans sa chair signifiante ! Avec cette musique qui crée le discours vrai, ô pertinence sensuelle! On pense que ce n’est pas de sa faute si elle naquit un jour, chez des ploucs effroyables. Des cons incommensurables, réfractaires à la vie, à la joie, à l’amour. Des fienteux malveillants qui savourent l’indécence de leur médiocrité : Mes cacolâtres beaux-parents ruminent à plein groin, le bonheur d’être bête et de ne point penser, béatement repus de leur inanité. Ah ! les slictueux ! Rabat joie, tu n’a pas d’excuses : On est responsable de son milieu. Mais enfin ! Il connaissait le drame algérien. Dans sa famille, on avait milité contre la colonisation, contre l’O.A.S…. Il connaissait le problème ! Alors pourquoi n’a t-il pas fui dès la première rencontre avec ss futurs beaux-parents ? Pourquoi a t-il accepté de les fréquenter, pourquoi s’est-il marié avec celle qui se révéla, plus tard, comme un parangon de la fausse gauche, droitière tendance américano-cognitiviste ? Et pourquoi Rabat-joie et lui n’en parlèrent-ils jamais, en vingt ans, observant un non-dit, respectant un tabou. Que cherchait-il, bon sang ? Quelque chose au fond de lui demeure trouble. Que voulait-il … réparer ?
Publicité
Publicité
Commentaires
Publicité