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orlando de rudder
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2 décembre 2005

rêverie d'affamé

Il y a des gens qui, jeûnent volontairement. D’autres s’inventent des régimes. Ils organisent ainsi le massacre de tout ce peuple que chacun de nous autres porte en soi : Manger est un poème. Qui comprendra le désespoir, quand la faim vaticine ? Le corps coupé en deux par le vide du ventre, on respire à demi. La sueur, en perles obèses amoindrit chaque effort. Des dégoûts infinis grouillent au milieu de l’âme : on sent que ça moisit toute volonté d’aimer. Voici la honte à bout, amertume pourrissante : De quel droit est-on là puisqu’on est seul est pauvre ? La faim est un naufrage ! Manger suffit : C’est tout. La faim tue. Et ceux qui ne sont point en terre de famine et restreignent leut appétit s’offrent un luxe d’outrance folle. C’est un blasphème contre le chant de la matière. C’est une insulte aux miséreux affamés. C’est la jouissance ignoble de Caïn ricanant: Alerte ! Manger est une prière. Manger offre à tout être capable d’aimer une renaissance légère à chaque bouchée. Une vie nouvelle, ténue s’installe en tout confort. Un existence, même, aussi absurde que miraculeuse. Le ventre est généreux, puisqu’il offre son amour : manger est une extase. La misère amoindrit et rend le cœur cruel : On tuerait le nanti, le moins pauvre que soi. On voudrait plus de dents pour faire vraiment trop mal. La faim féconde la haine, la bassesse féroce. Or, manger, c’est la grâce On ne mange que soi, fructueux cannibalisme ! On se reconstitue, poésie de l’azote, avec plantes et racines. On se construit en soi, chemin du même au même par les viandes onctueuses qui nous bâtissent en vrai : Manger est une rigueur. Les délires de la faim, les maussades, les pourris, les cruels et les lâches distille l’indignité de chaque oinstant vécu ! Que suis-je devenu, moi qui ai cru aimer ? J’assassinerais pour un cornet de frites ! Je vois des gens qui mangent, j’ai envie de les tuer ! Manger, c’est l’armistice. La matière a voulu que l’humain possédât une lente merveille, un très long intestin, qui incite à la sieste et demande de la chair pour un repos fructueux ! C’est l’ineffable fonction d’un sommeil à demi : la digestion sublime qui avance en beauté, d’un pas de sénateur, opportune opulence. Manger ? C’est la sagesse de toute folie féconde ! La faim maîtrise l’humanité fragile.On devient lourd et niais, et vulgaire, et infâme. On en oublie le ciel ! Et les oiseaux jolis ! Dès qu’on voit les étoiles que reflète une flaque, on pisse avec entrain pour en bouiller l’image. Manger ? Ciel et lumière ! L’inadvertance n’est pas de mise : parcours, conscience des goût, couleurs et consistances. Carnassiers somptueux, un ordinaire aimé nous construit en humanité gouleyante qui jubile ! On en devient meilleur : Manger est une pratique. Toute faim est ignoble; Manger est un miracle. Même l’athée veut prier quand la faim le terrasse ! On perd sa dignité en tentation dévote ! On se soumettrait vite à quiconque le voudrait.On serait bon esclave, obéissant et doux. On parlerait à dieu car la faim nous rend lâches ! Manger nous rend plus purs ! En lourdeur d’existence, il suffit de nos dents : en voici, des bijoux, des outils et des armes ! Lente mastication, crudité d’avalanche, patience du gastronome, urgence du goulu, sauvetage insensé des appétits fébriles, cérémonies subtile du repas partagé : Tout est bon, à l’instar de la vie en elle-même, à qui se veut conscient : Manger, c’est un rythme. Lancinance douloureuse, après trois jours ou quatre d’estomac évidé par la fringale intense : la faim sait s’installer, prendre ses aises en nous !Ô soyoins fiers de vivre et battons-nous quand même ! Contre le sort mesquin, manger est un combat ! Ce que l’on déglutit peut devenir grâce ! Ce que l’on englouti peut s’achever en farce ! Parfums subtil ou fort, jambonneaux et tripailles, céleri fort-en-gueule, ail au propos fervent, ça s’arrose, ô, le jour ! Manger est allégresse ! On ne peut pas s’aimer lorsque la faim agresse. C’est un ogre furieux qui nous bouffe en cadence. Notre cœur nous tabasse : il nous donne la nausée et des douleurs aux tempes ! La faim qui s’insinue nous fait puer la misère. On a le dos voûté et le regard peu clair. Un œuf, une tomate, et l’on redevint droit. L’éternité se mire dans un sandwich au beurre. Manger est un triomphe ! Rituel imperturbable des fourchettes en main, pâle stagnation des sauces : l’humanité désire. Quand vaincra t-on la faim ? elle nous rend méchant ! Il s’agit de passer à l’étape suivante : le bonheur d’être soi devant un plat de nouilles : Manger, c’est l’infini comme l’éternel retour ! Indigence, ô supplice, on se dit qu’on est là. Pour s’en assurer. Des milliers d’enfances viennent se noyer en soi. Et l’on pleure comme un veau qu’on ne pourrait pas cuire. Cœur rapé, comme une rave, on s’avance pourtant. Manger devient oubli. Toute conscience s’affirme au moment du désir ! Une joliesse de hareng peut suffir à la joie ! Un artichaut violet, une saucisse qui craque convainquent d’un art d’aimer que l’on peut répandre : ô, la chair est vivante ! Manger ? C’est un émoi ! On n’est pas des gens vrais si la pauvreté veille. Sa lueur pâlichonne n’éclaire qu’un sale masque. Sans visage au-dessous : on n’est déjà plus là. Est-on mort ou vivant ? Seigneur ! Je ne sais pas ! J’ai trop faim pour être moi. Manger, c’est devenir. L’instance vitale est forte, nous voici sur la terre ! Le ventre parle de nous en nous-mêmes ! En fort sérieux langage ! Sachons répondre vrai en sincérité forte : Manger ? C’est Recouvrance… Saliver en vain rend ronchon à l’envi. Ca grouille sous le bide car le vide gargouille. Puis un jour, il se tait. Manger est une parole. L’itinéraire des sens nous égare rarement : il est destin. Le plaisir nous rend bons en accorte tendance. La faim est hargne vile.On ne sait pas pourquoi: Manger est une énigme !
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