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orlando de rudder
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31 janvier 2006

Un extrait de mon livre sur les expressions concernant les aliments

pâte(s) Le latin du IVe s. utilisait le mot pasta, emprunté au grec tapasta. A la fin du XIe s., la paste est de la farine détrempée et pétrie, nécessaire pour fabriquer un « pein de neire paste ». Dans un fabliau, Des iii dames qui troverent l’anel au conte (il s’agit du nombre 3 en chiffres romain minuscules, ce qui est l’usage pour les textes médiévaux, mais on peut changer et mettre « trois ») où il est question de poisson « en paste ». Mettre la main à la pâte existe depuis longtemps : [il faut] que tu mectes la main a la paste dont le pain soustiendra le jeune Moyse. (Philippe de Mézières, le Vieil Pèlerin, ca. 1389.) Cette expression est employée au sens propre et s’adresse à un boulanger, mais le sens métaphorique n’est pas loin : on le trouve en 1486, chez Guillaume Alexis (Dialogue du crucifix et du pèlerin), où « mettre les mains a la paste » signifie « entreprendre un ouvrage ». En 1554, Bonaventure des Périers publie ses Nouvelles récréations et joyeux devis dans lequel on trouve « bonne paste de gens », désignant des personnes de bonne compagnie, de bonne volonté. Parmentier ne s’est pas occupé que de la pomme de terre ; rien de ce qui est alimentaire ne lui était étranger. Aussi, dans son ouvrage le Parfait Boulanger (1778), il mentionne les « pâtes d’Italie ». Brillat-Savarin, également, fera grand cas des pâtes dans sa Physiologie du goût (1825). Le Conseil supérieur de la langue française admet le pluriel spaghettis depuis 1990. Spaghetto signifie « ficelle » en italien, d’après le latin tardif spagus. Tandis que maccaroni se disait déjà à Gênes en 1279, venant au français en 1505. Il dérive du grec makarios, dont le sens propre est « heureux », désignant par métaphore le bonheur éternel c’est le nom de la soupe d’orge que les Grecs servaient au repas funèbre, avant de s’appliquer, par métonymie, à ce banquet lui-même. On ne s’écrit plus guère, on ne s’envoie plus de courrier intime et amical, bref, on s’abstient de « balancer des lasagnes » : cette expression signifie « envoyer une lettre » chez Vidocq. Les lasagnes sont des pâtes en forme de larges rubans. Le mot vient-il du provençal lausan, dérivé de « losange » ? À moins que l’étymon en soit lawzinag, mot arabe d’origine persane s’appliquant à un gâteau aux amandes. Les raviolis n’étaient jadis qu’une partie d’un repas copieux : On se décida pour un potage queue de bœuf, des rougets de roche grillés, un filet aux cèpes, des raviolis à l’italienne, des gélinottes de Russie et une salade aux truffes. (Émile Zola, l’Œuvre, 1886.) On trouve raviolle au XIVe s. dans le sens de « pâte avec hachis ». On a pensé à des étymons latins tels que rava ou rapa, « rave », ou à rubeola, « rouge, roux ». Robbiola, nom d’un fromage venant de Robbio, en Lombardie, est aussi évoqué, du fait qu’on trouve chez Pline (Histoires naturelles, L, IV, 21) le mot robiola, « fromage de chèvre ». En revanche, l’étymologie de tagliatelles est plus sûre : le Larousse du XIXe siècle les mentionne à l’entrée tagliatelli, identique depuis le XVIIe s. Auparavant, en 1585, on avait tagliatellie. Le tout est issu de l’italien tagliato, participe passé du verbe tagliare, « tailler, trancher ». Dans une Lettre à sa fille du 20 avril 1672, la marquise de Sévigné utilise l’expression comme un coq en pâte pour évoquer une situation confortable et tranquille – différente de celle du volatile ainsi préparé ! Le coq en pâte est excellent, d’un bel effet dans sa croûte briochée. Curnonski nous en présente plusieurs recettes dans Cuisine et vins de France (1974). : le coq en pâte traditionnel, le coq en pâte bourbonnais, à la franc-comtoise, à la façon du pays de Foix, printanier. pêche Du latin persica (VIe s.), issu de persicum, indiquant que ce fruit provenait de la Perse (Persica). En français, on trouve le pluriel pesches dans une Vie de saint Gilles, datant environ de 1180, mais une forme persches semble avoir eu cours au XIe s. En 1866, l’expression poser une pêche signifiait « déféquer », selon Delvau. Au début du XXe s., elle est fréquemment utilisée par Musette (pseudonyme de Victor Auguste Robinet) dans sa série des Cagayous, loufoqueries algéroises comptant parmi les sources de documentation linguistique relatives à l’Algérie coloniale. Pour Rigaud (1878), se faire épiler la pêche désignait le fait de se faire raser par un barbier. La peau de pêche, pour désigner une peau douce, se trouve chez Zola, dans l’Assommoir (1877), mais cette locution existait sans doute bien auparavant. En 1884 apparaît l’expression teint de pêche », lequel peut être fort abîmé par une pêche, c’est-à-dire un coup de poing au visage, « en pleine poire ». Notons que Raymond Queneau emploie en pleine pêche dans le même sens dans Loin de Rueil (1944). A-t-il fallu attendre Louis-Ferdinand Céline et les ricanements impardonnables de Bagatelles pour un massacre (1938) pour se fendre la pêche ? Cette expression signifiait sans doute déjà « rire », synonyme de « se fendre la poire ». En 1961, dans la revue Vie et langage, hélas disparue, P. Roche publia un article sur « L’argot de l’École de l’air », y mentionnant l’expression particulière à cette école : avoir la pêche, signifiant « avoir bon moral », « être en forme », « avoir la frite », qui était déjà en vogue bien au-delà de cet établissement d’enseignement. Avant d’évoquer un dessert passionnant – la pêche Melba –, il convient de parler d’ Helen Porter Armstrong, née Mitchell (1861-1931), chanteuse d’opéra exceptionnelle. Soprano colorature, elle fit carrière sous le pseudonyme de Nellie Melba. La légende veut que, durant la représentation d’Othello, en Amérique, la chanteuse interprétait Desdémone avec une telle chaleur qu’elle faisait pleurer l’assistance lorsque Othello l’étranglait. Alors, pour « calmer le jeu », elle faisait un signe pour qu’on apporte piano sur la scène. Nellie Melba, excellente pianiste, jouait et chantait alors Home Sweet Home ; le public reprenait en chœur et devenait moins triste. Alors, on pouvait poursuivre la représentation. La cantatrice se recouchait, et Othello pouvait enfin l’étrangler à son aise. En 1894, après une représentation de Lohengrin au Covent Garden, à Londres, Nellie Melba alla dîner au Savoy, où régnait le chef Auguste Escoffier. Ce dernier, en hommage à la grande musicienne se mit, comme il l’a écrit ensuite, à tailler dans un bloc de glace un cygne et, entre les deux ailes, il inséra une timbale en argent. Couvrir le fond de la timbale de glace à la vanille et sur ce lit de fine glace déposer des pêches à chair blanche et tendre, débarrassées de leur pelure puis pochées pendant quelques minutes dans un sirop à la vanille et refroidies. Une purée de framboises fraîches couvrira complètement les pêches, un léger voile en sucre filé jeté par-dessus complétera délicieusement cet entremets… On peut se passer du cygne ! Notons qu’il n’était pas question de crème Chantilly, délice qui s’exprime beaucoup mieux avec d’autres préparations. Et qu’exécuté ainsi, ce dessert diffère sensiblement de quelques préparations minables servies sous son nom par un désastreux abus de langage. Ce dessert est puissant : l’acidité des framboises doit attaquer avec force, puis s’harmoniser avec la consistance plus tendre de la pêche qui doit rester ferme. La glace « exige » d’être fortement vanillée. Le tout pas trop sucré. Chaque élément doit garder son goût, tout doit se répondre dans une symphonie gustative. Il n’y a rien de mièvre dans ceci : c’est une préparation énergique, presque violente, émouvante, à l’image de son inspiratrice : Auguste Escoffier, fin psychologue, a réalisé ainsi une sorte de « portrait gastronomique » de cette chanteuse à la tendresse immense mais rétive. Si ce dessert fut présenté dans un cygne de glace (son créateur ne se souciait pas seulement de décoration !), c’est à cause de cette vivacité : il faut qu’il soit à fort basse température, pour tempérer harmonieusement la saveur acide de la framboise. Et c’est pour équilibrer ce goût un peu sûr que les pêches sont cuites au sirop. N’oublions pas qu’à l’époque, les crèmes glacées étaient moins froides qu’aujourd’hui ! Une bonne pêche Melba doit « secouer », presque brutaliser, dérouter les sens, faire frissonner avant de s’épanouir en douceur vigoureuse ! Comme la splendide Nellie dans le rôle de Desdémone ! Il existe aussi un « toast Melba ». Il s’agit d’une sorte de fine biscotte, pas mauvaise… pépin Le mot dériverait du radical onomatopéique pep, qui traduit la petitesse, signifiée par le redoublement de la consonne p. C’est le nom du premier souverain carolingien, auquel on ajouta « le Bref » : une redondance pour indiquer que Pépin le Bref était encore moins haut que trois pommes ? Désignant la petite graine qu’on trouve dans une pomme, pépin est attesté dans la Chronique des ducs de Normandie, de Benoît de Sainte-Maure (vers 1175). Comme le noyau, on a pu considérer le pépin comme un symbole de vie, d’énergie : Fruits ! J’ai mangé votre pulpe juteuse. J’ai rejeté les pépins sur la terre : qu’ils germent ! Pour nous redonner le plaisir ! (André Gide, les Nourritures terrestres, 1897.) Encore que cette vie à venir puisse être l’objet d’opprobre et de commentaires haineux en des temps sans IVG et à morale d’une coupable sévérité, car avaler un pépin signifie « être enceinte », et, semble-t-il, en argot, après avoir « fauté », lorsque la naissance sera « illégitime » : – Tiens ! La mariée ! cria l’un des voyous, en montrant madame Gaudron. Ah ! Malheur ! Elle a avalé un rude pépin ! (Émile Zola, l’Assommoir, 1877.) Mais on peut aussi avaler les pépins au sens propre, comme Georges Simenon qui mangeait les pommes entières, sans rien en laisser, pas même le trognon – une dégustation loufoque à déconseiller, car l’on passerait pour avoir un pépin dans la timbale, c’est-à-dire « avoir un grain » : On rit cent fois de suite, sans se lasser, […] de ce jeune professeur qui, au cours d’un dîner, a considéré sa tranche de melon avec défiance et fini par la manger tout entière, y compris les pépins et l’écorce. (Jean-Paul Sartre, les Mots, 1964.) Cependant, il faut connaître l’art et la manière de recracher les pépins : Notre voisine mangeait une orange. Décidément, elle n’était pas d’allure distinguée. Elle avait son mouchoir sur ses genoux ; et sa manière d’arracher la peau dorée, d’ouvrir la bouche pour saisir les quartiers entre ses lèvres, de cracher les pépins par la portière, révélaient toute une éducation commune d’habitudes et de gestes. (Guy de Maupassant, Contes et nouvelles, « Les Sœurs Rondoli », 1884.) En 1887, pépin ou pépin d’amour évoquait joliment un « béguin », un penchant, un attachement, une attirance sentimentale : Loredan Larchey le cite, dans ce sens, comme argotique (supplément aux 9e et 10e éditions du Dictionnaire d’argot) ; d’autres le considèrent néanmoins comme populaire… Certains pépins peuvent aider pour conquérir l’âme sœur : les pépins de coing étaient la base de la bandoline, ancêtre de la gomina, qui, parfumée délicatement, ajoutait un charme aux belles dames. Encore ne fallait-il pas en abuser, sinon la risée était garantie : Au dernier bal de Saint-Cloud, madame de Castiglione avait de la poudre sur le devant de la tête et le chignon luisant de bandoline. Elle avait l’air d’être tombée sur un sac de farine. (Mérimée, Lettres à la comtesse de Montijo.) De plus, il peut arriver que cette gelée de pépins dégoûte vraiment, et qu’on la vomisse. Pourtant, les pépins, fussent-ils de coing, ne se mangent généralement pas : J’ai dégueulé ta bandoline, Noir laideron, Tu couperais ma mandoline Au fil du front. (Arthur Rimbaud, « Mes petites amoureuses », Lettre du voyant, 15 mai 1871.) En 1897, selon Esnault, pépin signifie une « avarie mécanique » dans l’argot de la marine, puis, par extension, tout problème de moteur, y compris celui d’une automobile : […] nous glissons sans l’ombre d’un pépin jusqu’au fond de la vallée, à travers les forêts endormies sous des monceaux de neige. (Jean Giono, les Grands Chemins, 1951.) Un pépin désigne un parapluie, un « pébroque » : pour certains, dont Albert Dauzat, cette désignation viendrait d’une pièce intitulée Romainville ou la Promenade du dimanche, vaudeville de Dewrin et Chazel qui fut représentée le 2 décembre 1807 au Théâtre des Variétés, à Paris, où apparaissait sur scène, avec un énorme parapluie, un personnage grotesque se nommant Pépin, dont le nom a sans doute été choisi pour la connotation comique de sa sonorité. On pense aussi que la pluie est un désagrément, un ennui, voire un pépin – un étrange transfert du nom de cette contrariété vers celui de l’instrument servant à la pallier ! Un pépin, par analogie de forme avec le parapluie, est un « parachute » dans l’argot de l’armée de l’air. Aujourd’hui, on trouve de nombreux fruits sans pépins : comment cela est-il possible ? A priori, ils ne peuvent pas se reproduire ! Les fruits sont d’ailleurs, au sens botanique, les graines, les pépins, qui renferment l’embryon. Pour obtenir des fruits sans pépins, il faut déclencher l’hypertrophie ovarienne nécessaire à la fructification en remplaçant la sécrétion naturelle d’hormones par une application artificielle de ces mêmes hormones, les gibbérellines. La graine se transformera en clémentine ou en pomme sans pépins grâce à l’intervention humaine. Les pépins de raisin et ceux de courge produisent des huiles de cuisine légères et qui ne « cassent » pas à haute température. Elles sont considérées comme plus saines que beaucoup d’autres… Les pépins d’agrumes, de coings, etc., servent à préparer la pectine, produit nécessaire à la réussite des confitures, gelées, marmelades et de certaines compotes. piment Dans la Chanson de Roland, il désigne une boisson ! Dans une Passion du Xe s., le pimenc est un breuvage comprenant du vin, du miel et des épices – un mixture échauffante qui fut interdite aux moines médiévaux par Pierre le Vénérable, abbé de Cluny. Ce nom correspond au latin pigmentum, signifiant « épices », « aromates », mais aussi « couleur » parce que certaines épices, comme le safran, propose une teinte vive susceptible de colorer les aliments, voire « pâte à peindre », « peinture » : piment et pigment sont en fait le même mot. Le piment vient du continent américain et a conquis le monde entier. Il sert à diverses préparations, comme le sambal-oulek, le pili-pili, la harissa, le tabasco, etc. Par comparaison, des propos pimentés sont « épicés », soit lestes, soit choquants ou énergiques. On dit « ça ne manque pas de piment » aussi bien que « ça ne manque pas de piquant ». Le piment d’un propos peut faire le charme d’une conversation, et aussi être la « pointe », l’ironie, la moquerie d’un poème satirique comme l’épigramme : Voilà Bixiou, s’écria Blondet, il en sera : rien de complet sans lui. Sans lui, le vin de Champagne m’empâte la langue, et je trouve tout fade, même le piment des épigrammes. (Honoré de Balzac, Splendeur et misère des courtisanes, 1844.) Ce sens continue d’avoir cours pour désigner toute chose qui excite l’esprit : Les secrets sont des piments sur le bout de la langue. Tôt ou tard ils mettent la bouche en feu. (Christian Bobin Geai, 1998.) Dans Robinsons (1925), Francis Jammes a créé l’hapax pimenton : Un pimenton rouge comme une course aux taureaux. Longtemps, les pays producteurs de piment ont vanté les mérites de leur production. Il s’est longtemps agi de savoir lequel était le plus fort, le plus piquant : enfin vint Wilbur Scoville (1865-1942). Cet estimable chimiste travaillait au laboratoire pharmaceutique Parke Davis, à Detroit, en 1912. Il a remporté plusieurs prix grâce à son excellence professionnelle. Le laboratoire Parke Davis étudiait les alcaloïdes et analysait aussi des substances comme le cannabis, la cocaïne, etc. Le piment servait aussi à composer des pommades hyperhémiantes contre les entorses et les problèmes de tendons ou de muscles. En créant le Scoville Organoleptic Test, Wilbur Scovile put enfin déterminer la force piquante d’un piment. Le principe en est la capsaïcine, dont un gramme peut être discerné par la langue dans 10 m3 d’eau. L’échelle de Scoville allait de 0 (poivron) à l’infini : citons le jalapeño, dont la force serait de 1 500 à 3 000, le cayenne qui est couramment à 20 000, et le tabasco qui titre parfois 120 000 ! Le plus fort serait un piment de l’Inde, dit tezpur chili, qui culmine à 855 000, dépassant le nagi jolakia avec ses 577 000. Il va sans dire qu’il faut diluer énormément ces végétaux lorsqu’on désire s’en servir pour rehausser le goût d’une préparation culinaire. En France, le piment d’Espelette, ezpeletako bipera en basque, est devenu une appellation contrôlée. Les piments du Pays basque furent déjà célébrés il y a longtemps. Il est vrai que la beauté du fruit, l’intensité de sa couleur, sont un plaisir pour les yeux : Et partout sur leurs balcons de bois, séchaient les citronilles jaune d’or, les gerbes de haricots roses ; partout sur leurs murs s’étageaient comme de beaux chapelets de corail, des guirlandes de piments rouges. (Pierre Loti, Ramuntcho, 1897.) Le piment d’Espelette est soumis à un cahier des charges précis : sa force ne détruit pas ses autres arômes et son excellence a convaincu tous les cuisiniers… La confiture de piments doux se concocte à la Martinique, mais aussi au Pays basque. Elle accompagne fort bien le foie gras.
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Commentaires
P
Pour ceux que ça interesse, voici un site de sauces pimentées genre Tabasco, venues du golf Caraïbes, et originales ! Vous pouvez acheter ces sauces en ligne !<br /> http://www.comptoir-du-piment.com
P
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