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orlando de rudder
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2 octobre 2005

souvenirs d'écriture

Dessins, gribouillis, taches.Quand j’étais jeune, je jouais avec mon écriture et je profitais de mon ignorance du dessin pour dessiner en écrivant. Par exemple, s’il m’arrivait de buter sur le mot « murmure » et de chercher la suite de ma phrase, c’était le moment pour chacun de ses jambages égaux d’ajouter une petite patte de chenille, une de ces petites pattes-ventouses qui se vrillent si tenaces à une branche. A une extrémité du mot figurait la tête un peu chevaline de la chenille, à l’autre bout la queue terminale, appendice ravissant souvent formé de brins soyeux comme du verre pilé. Colette, l’Etoile Vesper, 1989. Attitudes. Ca peut commencer à l’école : on gribouille distraitement. Au lycée, au lieu de prendre des notes, on devient songeard. Et voici que l’écriture se déforme ou s’arrête. Le stylo, la plume n’en travaille pas moins. Le dessin naît, sans qu’on s’en rende toujours compte. Les attitudes, les positions sont détendues : la joue posée sur la main ou carrément, le bras posé sur la table, la tête reposant sur le bras et l’avant bras formant un v à l’articulation du coude. Il arrive aussi qu’en attendant au téléphone, on griffonne sur le papier destiné à recueillir un numéro, une adresse, un renseignement.Parfois, comme chez Colette, le dessin jaillit de l’écriture elle-même. Ce dessin méditatif s’oriente vers l’état de contemplation mélancolique. En renforçant cette tendance naturelle, on augmente son impact créatif. Naguère on trouvait dans les journaux une réclame pour « L’Ecole ABC de Dessin ». Le slogan en était : « vous savez écrire ? vous savez dessiner ». Il s’agissait d’inscrire l’objet à dessiner dans une lettre de l’alphabet majuscule. La structure de la lettre permettait de créer les lignes de force. Le tout était de choisir la bonne lettre et de la projeter mentalement sur le modèle. La façade d’un château-fort, avec ses deux tours s’inscrivait naturellement dans un H, etc. Pour un peu, on aurait pu revenir à l’écriture protosinaïque dans laquelle le a, l’aleph représente une tête de taureau, le c un chameau et le i une main… juste retour des choses ? Ce n’est pas toujours l’écriture elle-même qui engendre le graphisme : un pâté, une tache, n’importe quoi entraîne la main, le stylo vers la représentation. Victor Hugo a ainsi développé certaines scènes merveilleuses à partir d’une tache de café au lait. Ce principe de la tache, qui fit naître le fameux test projectif de Rorschach, peut devenir systématique. C’est le cas des dendrites de Georges Sand : elle préparait des taches de différentes façons et les modifiait pour créer une superbes forêt, sylva pomposa, ou quelque paysage montagnard. Dendrite vient du mot arbre en grec. Ce terme désigne au départ, les dessins formés sur cetaines pierres, telles l’agathe et qui ont parfois l’aspect d’arbres ou de vues campagnardes. Même dans ce dernier cas, qui procède d’une intention, tout, n’est point créé d’une façon complètement consciente. L’artiste dépend des circonstances et le hasard y conserve une certaine part. Cet art inadvertant naît au moment où nous pensons à autre chose. Où nous faisons ou sommes censés faire autre chose. Pour ce qui est du dessin exécuté sans aucune intention, du dessin gratuit, il convient de noter qu’il advient durant un moment de non-conscience de soi, du moins de ce soi-là qui dessine. Le cerveau sait, bien entendu que nous dessinons. Un tel exercice demande esprit et main..L’esprit entend aussi, par exemple, le cours du professeur, même si nous n’y prêtons pas d’attention. D’ailleurs, il nous en restera parfois quelque souvenir. La vigilance n’est pas abolie. En même temps nous rêvons, rêvassons, laissant libre cours à notre pensée. Ttrois rivières roulent leur flot en notre for intérieur : l’écoute distraite du cours, le dessin qui se crée, la rêverie fluctuante. Le dessin n’est pas tout-à-fait inconscient, donc, mais il nous surprend parfois. Il ne semble pas se rapporter à notre rêverie, ni aux paroles entendues. Il paraît, hétéroclite, fantasque ou fantastique… certes il doit pouvoir être interprété et livrer quelque chose de notre inconscient. Ce n’est pas l’objet pour l’instant. En attendant, s’il existe un rapport entre lui et le discours, et avec la rêverie, nous ne le saisissons pas. Il surprend. Sans doute pourrait-on déterminer que nous nous trouvons dans un état de conscience particulier. Le cerveau droit et le cerveau gauche agissent ensemble, peut-être en synergie. Il est même possible que le rayonnement électro magnétique de notre cerveau soit modifié. Et que certains neuro-transmetteurs soient secrétés à ces moments. Toujours est-il que cet état est nécessaire, fortifiant. Il procède d’un chemin vers la connaissance, d’une réceptivité active particulière qu’il conviendrait d’explorer mieux et d’une façon scientifique.
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